Jeudi 30 Janvier 2025


Le village laurentien
Le terreau du mouvement patriote
Extraits du
JOURNAL HISTORIQUE

Conversation entre l’éditeur et l’éditeur du livre paru en 1838 relatant les évènements qui ont eu lieu à l’automne 1837.

Profondément frustrés d'être constamment rabroués, les Patriotes se préparent à la confrontation. Un mouvement de révolte couve un peu partout dans la province, particulièrement dans les Laurentides ! 
Ces vidéos ont été diffusées pour la première fois quotidiennement en novembre 2022 sur Facebook pour souligner le décompte des jours précédant la bataille de Saint-Eustache ainsi que la destruction du village de Saint-Benoit.
PatriotesSt Eustache

 

 

Les difficultés agricoles des années 1826-1836 et le fait que la couronne n’ouvrait pas des terres à la colonisation, tissaient en toile de fond, un climat de mécontentement à la Rivière-du-Nord.

Malgré l’éloignement et leur isolement, les colons de l'Augmentation ne se firent pas prier pour embrasser la cause des Patriotes, ayant déjà adopté l’habillement du pays et le boycottage des produits importés, lors de la présentation des 92 Résolutions en février 1834.

Jonathan Lemire « Là où se trouve Saint-Eustache, c’est le village où se retrouvent docteur Jean-Olivier Chénier, Patriotes important, mais aussi un Écossais leader et important Patriotes William Henry Scott. Donc, dans le vaste comté des Deux Montagnes, on trouve aussi le petit village de Saint-Benoît, aujourd'hui de Mirabel, encore un beau petit village!

Où on retrouve les principaux leaders du comté des Deux-Montagnes, autre Chénier et Scott, on retrouve aussi les Jean-Baptiste Dumouchel et ses fils Luc Hyacinthe Masson et son frère Damien et le curé Étienne Chartier. Ce n’est pas rien ça, c’est le seul prêtre qui va prendre position à proprement parler, pour le mouvement patriote. Étienne Chartier qui, après les troubles, va se pousser aux États-Unis, d’ailleurs.

Bref, les chefs patriotes qui voient leur tête mise à prix vont se réfugier dans Deux Montagnes dans Richelieu. Et à ce moment-là, qu'est ce qui reste à faire aux autorités? C'est d'aller les arrêter directement où ils se sont réfugiés. Donc, l'armée va se joindre à des constables, Bref 1837 est comme grosse opération de police, donc, on va se réunir des dizaines et des centaines de militaires pour aller arrêter ces chefs-là. »

  • Le 15 novembre, Amury Girod arrive à Saint-Eustache avec l’intention de s’assurer du contrôle du contrôle des patriotes de Deux-Montagnes, ce qu’il réussira entre le 18 et le 23 novembre.

  • Le 18 novembre, un débat surgit entre patriotes sur la nécessité de se procurer des armes. W. Scott, l'autre député patriote de Deux-Montagnes, s’y oppose, mais Girod qui est évidemment d'avis contraire gagne Chénier à ses idées, nous dit l’historien Serge Laurin.

  • Organiser un camp militaire exige le recrutement de soldats, la nomination d'officiers pour les commander, des vivres pour les nourrir, des munitions et des armes pour leur permettre de se battre. Girod et Chénier avaient une armée à construire. Leur projet se heurta au peu d'enthousiasme montré par la population de Deux-Montagnes en général pour la prise d'armes et à la résistance de personnages influents du comté, parmi lesquels le curé Paquin sera le plus ardent.

    L’armée du Nord

    Jonathan Lemire

    « Les Patriotes du comté des Deux-Montagnes, préalablement destitués à l'été 1837, vont en quelque sorte retrouver leur grade suite à l'assemblée du 1ᵉʳ octobre 1837 à Saint-Benoît. Il va y avoir une élection et la plupart vont retrouver leur grade de capitaine, de colonel, de milice, de sergent de milice. Et puis certains, sans expérience, vont aussi avoir d'autres grades de milice. »

Dès les mois d'octobre et de novembre, les dirigeants patriotes de la Rivière-du-Nord parcouraient les rangs et les chemins de l'Augmentation pour recruter de nouveaux membres. Les Patriotes de la paroisse de Saint-Jérôme ont vraiment formé un groupe homogène avec leur fameuse tuque bleue, et ont combattu les troupes britanniques.

En novembre, une expédition de 200 à 300 patriotes quitte Saint-Jérôme pour désarmer les Écossais de New Paisley, aujourd’hui New-Glasgow et les neutraliser au cas où ils seraient appelés à se battre au Sud. L'expédition est couronnée de succès et démontre que les habitants de Saint-Jérôme étaient capables de se mobiliser.

  • Sommés de se constituer prisonniers, Girouard, Dumouchel et Masson se réunissent le 23 à Saint-Benoît, jour de la victoire de Saint-Denis. Dumouchel et Masson décident de se défendre alors que Girouard est prêt à se soumettre.

    Réunis de nouveau le 25 novembre, Girod, Chénier, Masson et Dumouchel confirment la tendance favorable à la résistance armée contre celle des modérés.


    Culotté, Amury Girod veut marcher sur Montréal, mais un conseil de guerre décide de s’en tenir plutôt à la défensive.

Jonathan Lemire
« Amury Girod, le Suisse militant, lui, privilégie une offensive sur la ville de Montréal, laissé vacant par les garnisons qui sont dirigées préalablement à Saint-Denis et à Saint-Charles. Alors que les principaux leaders locaux que sont les Dumouchel, Girouard, Chénier, Masson et compagnie privilégient plutôt de rester sur la défensive ici, dans la région. »

Le 25 novembre, 109 Patriotes mal armés et sans chef affrontèrent 500 soldats anglais. Cette armée expérimentée écrase, après deux heures de combat, les paysans de Saint-Charles. On compte environ 35 morts du côté patriote contre 21 soldats tombés au combat, soit 3 morts et 18 blessés britanniques.

Une trentaine de Patriotes furent faits prisonniers.

La rébellion est maintenant écrasée au sud et les chefs patriotes sont en fuite.

Journal Historique d'un Eustachois
Conversation entre l’éditeur et l’éditeur du livre paru en 1838 relatant les évènements qui ont eu lieu à l’automne 1837. Plusieurs historiens s’accordent à dire que ce témoin oculaire serait, en fait, le vicaire François-Xavier DeSève qui secondait à Saint-Eustache le curé Paquin lors de la rébellion.

Éditeur : « Vous êtes sûr que vous vous voulez demeurer anonyme, Monsieur M. Deseves. »
Auteur; « Assurément »

Éditeur : « Bon, commençons la vérification pour la version finale », (bruit de feuille) « Bon voici »… Hésitation….

Début de lecture :

Éditeur : « Ces faits offrent aussi des preuves frappantes de la conduite noble et généreuse de Sir John Colborne et des soins bienfaisants de Son Excellence et de ses délégués pour rétablir la paix. ……….

journal historique

Devant le danger d’être attaquées de plus en plus imminent, les familles pro-gouvernementales quittent Saint-Eustache pour Montréal, du moins, la majorité d’entre elles.
Cet exode est massif puisqu'à la fin de novembre, tous auront quitté sauf les 83 Volontaires de Maximilien Globensky. Dans les derniers jours du mois de novembre, plusieurs familles de sujets loyaux ayant quitté le village, les patriotes en profitent pour utiliser certaines résidences vacantes.

CURÉ CHARTIER
« Comme curé de St Benoit, je les connaissais bien les chefs patriotes du comté de dans Deux- Montagnes, Ils vont organiser deux camps militaires!, Un camp à Saint-Eustache et un camp à Saint-Benoît. Et qu’on pourrait soutenir un siège de plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Pauvres nous autres, dans le fond il était défendu par une centaine d’hommes qui avaient creusé quelques tranchées autour du Grand-Brûlé. Le pire, moins de la moitié de nos braves avaient des fusils. On était ben mal parti ! »

LES CAMPS DE SAINT-BENOÎT ET SAINT EUSTACHE
Le camp de Saint-Benoît jouissait d'une réputation très surfaite et le camp de Saint-Eustache, improvisé en fin de novembre, n'avait rien d’une forteresse. Il n'avait pas été renforcé par quelque construction que ce fût. Seule une ceinture de sentinelle en assurait la garde tout en surveillant et ce qu’on appelait tranchées, n’étant en fait, que de timides barricades fortuitement construite.

Dans la région les leaders de Terrebonne Louis-Hippolyte La Fontaine, le dauphin de Papineau, et Séraphin Bouc, sont très actifs ainsi que ceux des Deux-Montagnes, les Girouard , Chénier et Scott qui informent la population sur les enjeux politiques On a longtemps dit que l'implication des paysans et des colons de 1837-1838 avait été le fait d'ignorants ou de gens dont on avait forcé la participation. Malgré leur analphabétisme, ils n'en étaient pas moins bien informés par l’élite.

Claude Martel
« Alors, je vous donne un exemple en 1837, au moment où ça commence à brasser beaucoup. Il y a trois leaders à Terrebonne, Charles Guillaume Bourc qui est vraiment le chef des Patriotes, qui assistée du notaire Léandre Prévost. Et puis, vous avez donc ce mouvement-là qui est très, très bien organisé. Je vous donne un exemple bien précis on est à l'église, le curé Porlier, lit un mandement de l'évêque pour inviter les gens à ne pas participer à l'insurrection des Patriotes. Et Prévost se lève en pleine messe et il dit à tout le monde de sortir de l'Église. Alors déjà, ça vous donne un peu l'idée de la force du mouvement patriote quelques semaines plus tard. Il y a près de 2500 patriotes qui sont rassemblés à Terrebonne et on attend l'attaque des Anglais. L'attaque ne viendra pas, finalement c'est une fausse rumeur.

« Du côté d'Argenteuil, étant donné que la population était majoritairement anglophone. Ça venait dure de cautionner cette mouvance-là, que les Patriotes avaient amené avec la responsabilisation des élites politiques. On savait qu'on était une minorité dans un grand monde majoritairement francophone. Donc le pouvoir britannique, la façon donc tout le système politique était construit. Pour les anglophones d'Argenteuil, c'était important de le conserver. Et c'est là que eux, ils n'ont pas suivi le mouvement, au contraire, ils ont été en résistance. Donc, à partir du moment où ce que les Patriotes ont manifesté, les Anglais ont refusé cette manifestation-là. Pis on a vu vraiment une frontière s'établir entre l'Ouest, c'est à dire Argenteuil et l'est, c'est à dire les seigneuries du côté des Basses-Laurentides.D»

Éditeur : « Amury Girod et Chénier accompagnés d’environ 200 hommes, font une expédition à Oka pour y prendre des armes à la Compagnie de la Baie d'Hudson et chez les Mohawks de la Mission. Mais ceux-ci, ayant choisi leur camp, préfèrent les fournir gratuitement aux soldats britanniques. Malgré la vive résistance de Messire Dufresne supérieur de la mission ils enlevèrent un canon appartenant aux missionnaires et transportèrent toutes leurs prises à St. Benoit. »

Éditeur : « Le vendredi, premier jour de décembre, devant le nombre croissant de Patriotes dans le village de Saint-Eustache, le docteur Chénier se rend au presbytère accompagné de François Guérin et il s'empare par la force des clefs du couvent, voisin de l'église et nouvellement construit. Dorénavant, le Couvent servira de quartier général pour les Patriotes.

Incroyable, j’ai l’impression d’être là ! »

Jonathan Lemire
« Pour établir un camp au village de Saint-Eustache à partir du début décembre 1837. Girod et Chénier vont établir leur quartier, d'abord le quartier général au couvent, mais pour loger les principaux radicaux qui vont arriver ici et là, on va occuper, on va littéralement squatter les principales demeures laissées vacantes par les loyalistes que sont notamment les marchands Globensk., mais aussi les différentes maisons appartenant aux seigneurs. »

Éditeur : « Pendant toute la journée et celle du lendemain les patriotes s’occupèrent à visiter et à fouiller les maisons du village et des environs, et enlevèrent tout ce qu’ils purent y trouver de munitions, d’armes et de provisions pour nourrir les volontaires du camp. Dans les faits, ils firent du pillage pendant les deux semaines précédant l’affrontement. Il y avait environ 60 patriotes se trouvaient au camp. »

M. Scott accompagné de Emery Fere qui était capitaine, encourage les miliciens à se retirer sur leurs terre, il cherchait à ramener les ramener à un patriotisme plus modéré.
Mais les radicaux, irrités contre lui, parce qu'il avait occasionné des désertions de partisans, le menacèrent de le tuer et emprisonnèrent Fere au presbytère.


Le 2 décembre, une délégation de Sainte-Anne-des-Plaines, arrive à Grand-Brûlé avec de mauvaises nouvelles. Guillaume Provost, membre du comité central du comté de Terrebonne, et Moyse Ollier avaient promis, trois jours auparavant, de recruter dans leur paroisse plusieurs compagnies pour les mettre au service de l’armée du Nord.
Selon eux, « les sentiments de la population avaient complètement changé depuis la proclamation des magistrats et l’arrivée [à Montréal] des prisonniers et des troupes ».




Éditeur : « M. Deseves vicaire de St. Eustache, après la grand-messe, fit la lecture de la proclamation à la porte de l'église, promettant protection à tous ceux qui ne prendraient pas les armes et qui demeureraient paisibles chez eux. Le député Scott, malgré les menaces qu'on lui avait déjà faites la veille, réitéra sa demande de se retirer paisiblement et d'obéir à un ordre du commandant général sir John Colborne, au cours d’une réunion tenue dans le couvent, après la grand-messe. Résultat : le camp se vida si bien que le soir il n'y restait pour le garder qu'un jeune homme de seize à dix-sept ans. »

Jonathan Lemire
« Le cas du marchand William Henry Scott est quand même intéressant parce que lui, ayant sa tête mise à prix par le gouvernement, voit aussi sa tête mise à prix par les patriotes radicaux parce que durant le mois de décembre 1837, passant d'un radical, il devient plutôt modéré, donc il va trouver refuge finalement chez son frère Neil Scott, à Sainte-Thérèse. »

Éditeur : « J’ai apporté une petite modification ici, dites-moi ce que vous en pensez. »
« Le soir, après vêpres, M. Turcotte, curé de Ste-Rose, vint souper au presbytère en compagnie du curé Paquin annoncèrent la défaite de Saint-Denis au Docteur Chénier, mais ce dernier demeura inébranlable. Le Dr Chénier ajouta qu’il était déterminé à mourir les armes à la main, plutôt que de se rendre. »
Auteur; « C’est bien ce qu’il a dit.. »

 




Éditeur : « On annonça que des troupes étaient en marche pour venir attaquer les insurgés à la Rivière du Chêne, et qu’elles étaient déjà rendues à Saint-Martin. Cette nouvelle sonna l’alarme et ceux qui tenaient le camp au village, mirent tout en œuvre pour rassembler des partisans. Il n’y avait alors dans le camp de St Eustache, que 60 hommes réunis sur la place devant l’église.

Messire Ducharme curé de Ste Thérèse, était en visite au presbytère au moment de l’alarme. Lorsque Girod arrive à Rivière-du-Chêne, le matin du 5 décembre, il trouva seulement 28 hommes en armes et le presbytère déserté par son clergé. Il parut fort irrité que l'on avait permis aux deux prêtres de quitter le presbytère, et il députa immédiatement trois de ses gens pour les ramener, leur enjoignant expressément de les tuer s'ils refusaient de revenir. »

Devant la mauvaise humeur fort compréhensible de son général, le colonel Chénier l’informe qu’il a expédié des messagers battre le rappel des troupes dans les paroisses de l’arrière-pays. Son adjuration est entendue: le lendemain, une compagnie de 100 hommes arrive de Sainte-Scholastique, puis entre 150 et 200 miliciens de Saint-Jérôme. Des centaines d’autres suivront et l’effectif de l’armée du Nord atteindra le millier le 13 décembre.

Éditeur : « Ce jour fut marqué par l'expédition des insurgés qui coupèrent le pont qui se trouve sur la rivière des mille iles, près Ste. Rose, et qui appartient à M. Porteous. Vingt-cinq hommes furent envoyés par Girod à Sainte-Thérèse pour détruire le pont. Ils réussissent à affaiblir les poutres du pont qui enjambe la rivière des Mille Îles.
D'une façon régulière, à compter du 6 décembre, on retrouve au camp de Saint-Eustache environ six cents Patriotes mobilisés. »

Éditeur : « Le vicaire Deseves alla seul pour dire la Ste Messe et rencontra Girod, plus conciliant qui invite les prêtres à venir tous les jours au village pour dire la messe et y passer la journée, »

« À St Jérôme, une patrouille se pointe chez Casimir Testard de Montigny, marchand de Saint-Jérôme et fondé de pouvoir du seigneur Charles Lambert-Dumont ; parce qu’il a organisé chez lui une assemblée pour recommander aux habitants de se dissocier des Patriotes, il est conduit de force à Rivière-du-Chêne et incarcéré. Félix Paquin, neveu du curé, lui-même intouchable et assigné à résidence, est mis aux arrêts sur l’ordre de Girod; il craint que le neveu donne suite au projet de son oncle et se rende à Montréal pour informer les autorités de la situation dans les Deux-Montagnes. »

Éditeur : « Jour de la conception de la Vierge et fête d'obligation parmi les catholiques. Depuis la veille il y avait au moins 1500 hommes au village et à chaque instant il en arrivait de nouveaux de tous côtés. A partir de ce jour-là, les deux prêtres se rendirent régulièrement au village, y dirent la messe, y passèrent la journée sans être nullement inquiétés, et le soir ils quittaient le village pour se rendre à la ferme de M. Paquin. »

Éditeur : « Les insurgés faisaient alors du pillage leur principale occupation ; ils allaient dans toutes les fermes mettaient à contribution tous ceux qui ne marchaient pas avec eux et de gré ou de force s'emparaient de ce qu'ils avaient de mieux en bétail, chevaux, voitures, etc. »
« Il n'est pas facile d’estimer le nombre de patriotes présents aux camps militaires de Saint-Eustache et de Saint-Benoît. À Saint-Eustache le nombre varie considérablement d'une journée à l'autre. Ou bien on y était venu par curiosité ou dans le but de s'amuser, ou bien on y avait été amené par la force et on ne ratait pas la première occasion qui se présentait pour s'enfuir.

C'est pourquoi Girod et Chénier avaient ceinturé le camp de sentinelles pour empêcher ces évasions mais aussi pour contrôler ceux qui y pénétraient. »

Jonathan Lemire
« Dans les jours précédant la bataille de Saint-Eustache, le 14 décembre 1837. En fait, depuis le début décembre 1837, le nombre de personnes va quand même varier. Au camp armé de Saint-Eustache par dizaines, par centaines, vont arriver de Saint-Benoit, Sainte-Scholastique, Sainte-Hermas, voire même de Saint-Jérôme ou des alentours du comté de Terrebonne, un petit peu aussi pour venir bonifier la quantité de personnes. Au camp armé de Saint-Eustache. Il n'y aura pas un nombre défini d'une journée à l'autre. Certains vont quitter, certains vont revenir. Donc certaines journées, il y aura quelques dizaines, voire quelques centaines. Et au plus haut, il y aura un millier de personnes au camp armé de Saint-Eustache. »

Éditeur : « Le dix était un dimanche; les offices Divins eurent lieu comme à l'ordinaire; l'église et ses ministres ne reçurent aucune insulte, mais on ne vit guère aux offices que les individus qui formaient le camp de St. Eustache ; les autres n'osaient paraitre au village car dès qu'ils y paraissaient, ils étaient saisis et retenus de force pour augmenter le camp. »

« Les chefs promettaient de leur donner bientôt le choix des plus belles terres ; ils leur promettaient aussi l'absolution des dimes et des rentes seigneuriales et qu’ils remporteraient la Victoire et perdraient Montréal sans tirer un seul coup de fusil. »

 

Éditeur : « L'alarme est donnée à 15 heures pour la seconde fois, il y avait environ 400 hommes au village, depuis que la glace était prise. Tous les jours des bandes considérables d'entre eux traversait pour aller à. St. Martin ou, ailleurs se mettre à l’abri de l'attaque sur St. Eustache.

« On avait aperçu de l’autre côté de la rivière, des troupes arrivant de Saint-Martin. C’était un petit détachement vis-à-vis Saint-Eustache pour examiner la glace et voir s’il était possible de faire traverser les troupes. »

Éditeur : « L’abbé Chartier en visite au presbytère, se montrait pour la première fois à la Rivière du Chêne depuis que la rébellion avait éclaté. Il se rendit ensuite au camp visiter ses braves et après leur avoir donné des encouragements, il repartit pour sa paroisse de St-Benoît. »

Jeudi 14 décembre
Vers 7h00, le matin, les troupes de Colborne quittent Saint-Martin, dans l'ile Jésus en direction de Saint-Eustache, où le gros de l'armée britannique s’était rassemblé. Les troupes se dirigèrent vers la rivière des Mille Îles et traversèrent le cours d’eau à la hauteur de Sainte-Thérèse et prirent ensuite le chemin de la Grande Côte.

Avant la bataille devenue imminente, Jean-Olivier Chénier se rend auprès de son épouse et il a un long entretien avec elle. Revenu auprès de ses hommes, les préparatifs se poursuivent tout en ignorant l'importance des forces de l'ennemi.

19LA BATAILLE DE SAINT-EUSTACHE
Par un froid glacial et dans deux travées enneigées, les soldats marchent deux par deux, vêtus de leur fameux habit rouge, et portant fusil à l'épaule.Les Volontaires de Maximilien Globensky, nouveau seigneur des Mille-Îles en raison de son mariage avec Elmire Lambert Dumont, prennent un raccourci plutôt périlleux vers Saint-Eustache. Vers onze heures et quart, les Patriotes aperçoivent des hommes armés en face de l'église, de l'autre côté de la rivière.


JOURNAL HISTORIQUE D’UN EUSTACHOIS
Éditeur : « A onze heures et un quart, on- vint donner l'alarme, c'était la troisième alarme depuis quelques jours Aussitôt tout le village fut en émoi.

Forgeron02LE MINUTE DU FORGERON
« Les Patriotes dans la région de Deux-Montagnes, Saint-Eustache, Saint-Benoît, Saint Sicho, pis tout ça là. On a plein d'histoires autour de ça. Ma version à moi parce qu'on a plein de version. Ben vous savez que c'est toujours le vainqueur qui écrit l'histoire et non pas le vaincu. Ma version de tout ça, c'est pas dur. Le 14 décembre 1837, il y avait au-dessus de 600 patriotes à Saint-Eustache, autour de l'église. Ils y ont vu arriver du côté de l'île Jésus, ça, c'est de l'autre bord, c'est Laval. Ils y ont vu arriver quinze cents soldats anglais avec les gros chapeaux hauts de forme, avec la cavalerie, avec des canons. Ben dans les six cents patriotes, qui étaient du côté de Saint-Eustache. Il y avait 200 fusils pour 600 gaillards. Les autres avaient des pelles, des fourches, des piques. Il y en a 400 qui ont eu peur, qui ont pris la poudre d'escampette et qui sont montés vers Saint-Benoît et qui ont été ce caché dans les terres. Il y en est resté deux cents. »

Jonathan Lemire
Jonathan Lemire« Le docteur Jean-Olivier Chénier est dans l'église de Saint-Eustache avec environ 70 individus. Certains ont été rentrés à l'intérieur de gré, certains de force. Les principaux témoignages nous mentionnent que Chénier aurait fait couper l'escalier montant au jubé, rendant ces prisonniers certains de ces de ses principaux défendeurs. Certains sont armés, certains ne le sont pas. Alors l'armée est tout autour de l'église de Saint-Eustache. Certains généraux britanniques vont se positionner derrière l'église, moins défendue à cet endroit-là, pour rentrer par la sacristie. On va échanger même des coups de feu à l'intérieur de l'église avec ses principaux soldats là. Puis un feu va être allumé derrière l'autel de l'église de Saint-Eustache et rapidement, le temple catholique va prendre feu. Et en quelques minutes, tout va rapidement s'embraser. Donc s'offre un choix déchirant, c'est à dire soit de brûler vifs à l'intérieur ou de sauter par les fenêtres donnant sur le cimetière, juste à côté de l'église de Saint-Eustache. »

« Je me retrouve sur le site de l'historique bataille de Saint-Eustache, donc, derrière l'église même, mais aussi derrière le presbytère, le couvent, ici et sur l'ancien site de la maison de la famille Dumont, donc les seigneurs de l'endroit, aujourd'hui l'école Notre-Dame. C'est ici même que Jean-Olivier Chénier va affronter les volontaires loyalistes de Saint-Eustache qui vont apparaître juste de l'autre côté de la rivière. Ici, environ une centaine d'hommes armés. Puis, à ce moment-là, on est vers la fin de l'avant-midi. Mais en même temps, les Patriotes de Saint-Eustache vont voir arriver par vers l'est le gros des troupes militaires du général John Colborne qui vont ceinturer le village de Saint-Eustache, mais principalement la place publique du village. Ici même derrière moi. »

« En fin d'après 12 h, le docteur Jean-Olivier Chénier va réunir ses principaux lieutenants, puis va sauter par une des fenêtres menant donnant sur le cimetière, entre l'église et le couvent de Saint-Eustache. À ce moment-là, ils sont cinq ou six. Puis, mettant le pied au sol, plusieurs témoignages, en fait, racontent la mort de Chénier.

Il y a différentes versions, dont la plus répandue, la plus réaliste est que Chénier met un pied au sol avec quelques-uns de ses principaux lieutenants et reçoit à ce moment-là une balle qui va le blesser, vraisemblablement mortellement, voire faire quelques pas vers la rivière, puis voit tomber mort à cet endroit-là. On va retrouver ça encore en fin de journée, autour de 18 h, et on va le conduire à l'auberge à dessein ou on va faire littéralement son autopsie de la part des chirurgiens médecins britanniques pour constater que c'était bel et bien une balle de l'armée qui a tué le chef patriote. »

LE MINUTE DU FORGERON
Les soldats anglais ont mis le feu à l'église. Là, ils se sont fait tirer les patriotes quand ils sautaient par les fenêtres parce que l'église était en train de brûler. Ça se résumer assez vite.
Évidemment, les Anglais ont dit les Anglais, mais c'étaient des Britanniques.
Mais les Britanniques les ont mis le feu au village de Saint-Eustache. Ils ont quasiment toutes brûlé, sauf quelques maisons de pierre d'anglophones. Un drôle de hasard, évidemment. Et évidemment, Colborne lui a dormi dans une belle maison en pierre, au chaud, le ben tranquille la nuit du 14 décembre. »

 

Éditeur : « Tous les participants furent rassemblés sur la place de l’église avec leurs armes, comme s’il se fut agi d’une revue ou d’un départ pour une expédition. Ils étaient au nombre de huit cents environ, armés et équipés de pierres et des bâtons et de quelques armes. La plupart d'entre eux étaient de Sainte-Scholastique et de Saint-Jérôme, peu de Saint Eustache.
Messire Chartier était de retour au camp de St. Eustache. »
« Pendant ce temps, le général John Colborne quittait Montréal à destination de Saint-Eustache à la tête de 1 500 hommes. »

Jonathan Lemire
« La veille de la bataille, le 13 décembre 1837, les Patriotes de Saint-Eustache s'organisent pour aller attaquer le village de Saint-Martin, sur l'île Jésus. On s'organise un peu, on va, on organise des expéditions pour aller chercher des armes, notamment à Sainte-Geneviève. Et puis finalement, on va être surpris le lendemain. On n'aura pas le temps de faire cette fameuse expédition là. Dans l'intervalle, à Saint-Eustache, et même dans les jours précédents, il va y avoir une ambiance de fête qui va teinter les jours au village. Donc la nourriture et même l'alcool va couler à flots à Saint-Eustache et il va y avoir une ambiance quand même assez insouciante. On ne s’attend vraisemblablement pas à être attaqué le lendemain. Le 14 décembre 1837.

 

Éditeur : « A neuf heures, Sir John Colborne fit sonner la trompette du départ et les troupes royales se mirent en marche pour le Grand Brulé, laissant la garde du village de St. Eustache aux volontaires du capitaine Globensky. Au village de St-Benoit, environ trois cents hommes qui ne demandaient-pas mieux que de se rendre à discrétion ; la fuite des chefs avait découragé leur parti, te plus grand nombre, s'était enfui et les trois cents qui restaient ne demandaient que d'avoir la vie sauve. »

EXIL DU CURÉ CHARTIER
Patriote cognant à la porte
Curé « Qui va là »
Villageois « C’est moi monsieur le curé,, vite il faut partir, les anglais arrivent. »
Curé : « Merci mon fils, merci, adieu ma chère Ariane, je dois partir, les anglais me cherchent. »
Servante : Ben oui, j’ai su ça!
Une récompense de £500 Livres Sterling pour votre capture, c’est ben trop peu demandé!
Curé : « À mon grand désespoir, je dois m’enfuir. Tu salueras mes bons paroissiens pis j’espère qu’on se reverra bientôt. »
Servante : « J’y manquerai pas monsieur le curé »
Curé : « Adieu ma fille ! »

INCENDIE DE SAINT-BENOÎT
Après la bataille de Saint-Eustache, les troupes régulières et volontaires du général Colborne se rendent à Saint-Benoît le 15 décembre afin d'arrêter les chefs rebelles de l'endroit.
Sur son chemin, elle rencontre une délégation de citoyens du village. Ceux-ci, leur expliquent que les chefs Patriotes sont en fuite et que Saint-Benoît n'entend pas résister. Colborne exige alors que les habitants lui remettent toutes leurs armes, ce qu'ils s'empressent de faire.

LE MOT DU FORGERON
Forgeron
« Colborne, Maitland pis tous les soldats, ce qu'ils ont fait ça a été simple ! Ils ont ramassé les armes, ils ont ramassé tous les gaillards, puis éventuellement, ils vont aller porter en prison au pied du courant. Puis ils vont s'en débarrasser. Mais tout de suite après ça, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ben les Britanniques ont tout simplement tout brûlé au complet le village à Saint-Benoît. Mais quand tout est au complet, ils ont toutes brûlé au complet. Aucune arme pour se défendre, aucuns hommes, aucuns gaillards dans le village pour les défendre. Qu'est ce qui restait? Les femmes, puis les enfants? Vous avez déjà entendu l'expression des bonnes s femmes toutes nues dans la rue en plein hiver? C'est ce qui s'est passé à Saint-Benoît.

À Saint-Benoît là, imaginez les viols, les vols qu'il y a eu!
Parce qu'avant de brûler une maison, on va ramasser l'argenterie, on va ramasser les bijoux, on va ramasser le vin, on va ramasser la bonne bouffe et après ça, on va mettre tout ce beau monde au beau milieu de la rue, en plein hiver, on est le 15 décembre, il fait fret là! Il y a de la neige. Plus de maisons, plus de toits. Ça, c'est le 15 décembre à Saint-Benoît. C'est affreux ce qui s'est passé. Je ne vous en dis même pas la moitié du corps de ce qui s'est passé pour vous ».
st benoit

Claude Henri Grignon écrit ces propos :
Malgré l'absence totale de résistance, Colborne permet à ses troupes de raser le village le matin du 16 décembre 1837. Tout est mis à feu et à sac. De nombreuses mères de famille sont retrouvées les jours suivants mortes gelées avec leurs enfants.

Victorieux, Colborne sème la terreur partout où il passe. Tous les villages des environs subissent des représailles. Devant les scènes d'horreur, le gouverneur Gosford abandonne l'administration du pays à Colborne et il retourne en Angleterre.

En effet Gosford donne sa démission en novembre 1837 et celle-ci ne fut acceptée qu’en janvier 1838.

Lorsque Colborne quitte Saint-Benoit, il mandate le colonel Maitland, pour aller dans les villages de Sainte-Scholastique et de Sainte-Thérèse et Terrebonne, afin de confisquer les armes des habitants et de s`assurer que toute résistance à la couronne est maintenant chose du passé.
Le 16 décembre, l'armée fait un arrêt à Saint-Eustache pour y cueillir les prisonniers, puis reprend le chemin de Montréal. Au total soixante-dix-sept Patriotes locaux sont emprisonnés à la nouvelle prison de Montréal, la Prison du Pied-du-Courant.

JOURNAL HISTORIQUE D’UN EUSTACHOIS

Certains jugerons ce récit favorable sinon à tout le moins biaisé en faveur des troupes britanniques. Auront-ils tort ? À vous de juger!

Texte
« Son excellence Sir John Colborne eut même la complaisance de laisser un ordre semblable entre les mains de M. Deseve qui devait la montrer au commandant de chaque nouvelle troupe qui viendrait successivement à St. Eustache.
La conduite, de Sir John Colborne pendant toute cette campagne a été remplie d'une douceur admirable, et ses troupes officiers et soldats méritent de grands éloges; il et malheureux que l'on ne puisse adresser les mêmes compliments à certains de volontaires. »

SAINTE-SCHOLASTIQUE

Au lendemain de la destruction de Saint-Benoît, sous le commandement du colonel Maitland, les vainqueurs reprenaient la route en direction de Sainte-Scholastique en recherchant des rebelles, incendiant des bâtiments sur leur passage. À leur arrivée au village, quelques centaines d'habitants brandissaient des drapeaux blancs aux cris de « Vive la Reine».

Le curé Bonin empêcha quelques soldats de mettre le feu à l'église. Au total, 4 maisons du village et 40 dans la paroisse environnante avaient été brûlées à Sainte-Scholastique.

Bilan

La région avait subi des dommages des plus sérieux tant sur le plan humain que matériel. Sa population devait reconstruire villages et maisons détruits par la guerre incendiaire. Dévasté, le comté des Deux-Montagnes se tient tranquille l'année suivante.

Pour cause, on y dénombre plus de 200 arrestations à la suite de la campagne sur Saint-Eustache, plus de 70 à 80 décès lors de la bataille du 14 décembre 1837 et plus de 600 réclamations par des habitants du comté ayant subis des dommages à leurs biens et propriétés en raison du passage des troupes régulières et volontaires,

Les réclamations

Jonathan Lemire

« Suite au trou de 18d37 38, le gouvernement réformiste de Louis-Hippolyte Lafontaine va mettre sur pied une importante commission genre de commission d'enquête sur toutes les pertes subies par la population au moment des troubles pertes subies autant par les patriotes que par l'armée anglaise. Donc, si on parle de Saint-Eustache et en fait de tout le vaste comté des Deux-Montagnes, il va y avoir 600 réclamations faites par des gens de notre région, donc des réclamations. C'est autant pour un fusil qui a été pris par l'armée que par les patriotes, par exemple. Mais c'est aussi les dommages qui ont été subis aux propriétés. Ma maison a été incendiée, par exemple. Je me suis fait voler quantité de chevaux. On m'a brisé telle chose, on m'a volé tant de quantité de foin. Donc c'est des exemples comme ça. Donc il y a eu 600 réclamations suite aux troubles de 1837 et 1838. »

Conséquence

Jonathan Lemire

«  Il y a plusieurs conséquences aux rébellions du 137. D'un dans les Laurentides, évidemment, le village de Saint-Eustache étant le chef-lieu réduit en cendres, pour ainsi dire, il y a des villages plus importants qui vont prendre en quelque sorte leur essor, que ce soit Sainte-Thérèse, Terrebonne. Mais pratico pratique, les familles vont être décimées. Et puis, ça va amener à l'expansion des Hautes-Laurentides parce que des villages étant réduits en cendres Saint-Eustache, Saint-Benoît, entre autres principalement. En fait, les familles décimées vont les chercher des terres un petit peu plus au nord. »  

sylvain.rondeau
"Mais tout de suite après ça, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ben les Britanniques ont tout simplement tout brûlé au complet le village à Saint-Benoît. Mais quand tout est au complet, ils ont toutes brûlé au complet. Aucune arme pour se défendre, aucuns hommes, aucuns gaillards dans le village pour les défendre. Qu'est ce qui restait? Les femmes, puis les enfants? Vous avez déjà entendu l'expression des bonnes s femmes toutes nues dans la rue en plein hiver? C'est ce qui s'est passé à Saint-Benoît.

À Saint-Benoît là, imaginez les viols, les vols qu'il y a eu!

Parce qu'avant de brûler une maison, on va ramasser l'argenterie, on va ramasser les bijoux, on va ramasser le vin, on va ramasser la bonne bouffe et après ça, on va mettre tout ce beau monde au beau milieu de la rue, en plein hiver, on est le 15 décembre, il fait fret là! Il y a de la neige. Plus de maisons, plus de toits. Ça, c'est le 15 décembre à Saint-Benoît. C'est affreux ce qui s'est passé. Je ne vous en dis même pas la moitié du corps de ce qui s'est passé pour vous ».